Peu de familles ont autant façonné et marqué une ville que les Viscontis avec Milan. Bien sur, il faudrait vraiment avoir vécu sur une  île déserte pour ne pas connaître le travail d’un des maitres du cinéma néo-réaliste italien: Luchino Visconti ou celui de son neveu photographe décédé du covid en 2021. Mais, mais, mais, me direz vous si le travail artistique du réalisateur fétiche d’Alain Delon ou Marcelo Mastroianni est connu, que savons-nous de l’illustre lignée dont il descend ? Rien, si peu, beaucoup, passionnément, à la folie.. pas du tout ?? Alors, installez vous bien confortablement, et surtout suivez bien car il y aura pléthore de  » Giovanni », Galeazzo »,  » Barnado »  » Luchino »  » Ottone »  mêmes prénoms mais époques voire même siècles différents.  Vous êtes prêts ? C’est parti pour la découverte d’une famille bien moins sordide que les Windsor/ Saxe Coburg Gotha, et dont les ramifications s’étendent à travers toute l’Europe.

LES SEIGNEURS DE MILAN

LES ORIGINES

Le nom de famille Visconti est très répandu en Italie. A l’instar de celui des Prada par exemple; Nombre de Prada, mais tous ne peuvent revendiquer appartenir à la famille du couturier.  Au fil des siècles, le nom Visconti : symbole de puissance et d’autorité, est devenu bien trop précieux pour le voir disparaitre à la mort de Filippo Maria Visconti. Aussi, chaque comté, ville, seigneurerie à travers l’Italie fit renaitre le nom. Cependant, attention: tout ce qui brille n’est pas or. Tous les Visconti ne font pas partie de LA  famille Visconti. Il y a les roturiers et les nobles.

Et là encore, même chez les nobles, il y a deux familles Visconti aussi semblables que le jour et la nuit. C’est à dire que d’un côté vous avez la vraie famille Visconti. Celle connue (pour ceux qui s’intéressent à l’histoire) pour avoir régné sur Milan, et surtout pour Luchino Visconti, le cinéaste…. Ceux sont les Viscontis di Modrone qu’historiens et généalogistes considèrent comme la seule branche légitime.

Ses origines remontent à la famille Bourguignonne des d’Ivrée par un des fils cadet de la famille. Pour vous donner une petite idée, cette famille donnera des souverains dont des Reines à la France  comme Blanche de Castille, mère de Saint Louis. Elle donnera également des Reines à l’Espagne d’Isabelle la Catholique à Jeanne la folle ou son fils Charles V, Empereur du Saint Empire Romain Germanique. Sur la péninsule transalpine: Pape, Roi .. et les Visconti

Les marquis d’Ivrée sont d’origine lombarde une tribu d’envahisseurs germaniques qui s’établit dans la partie du nord de l’Italie à laquelle on donnera leur nom. Un peu comme les Francs avec la Gaulle.

On trouve trace de l’apparition du nom Visconti au début du 10eme siècle, via la branche cadette d’une famille royale. Les Visconti étaient seigneurs de Massino, lieu situé stratégiquement sur les hauteurs à l’ouest du lac Majeur et du Tessin. Dès le xiie siècle, ils sont cités comme vassaux de l’archevêque. La famille tire son nom du latin vice comitis, qui signifie « vice-comtes », vice (celui qui représente) et comites (avec toi) indiquait celui qui était avec quelqu’un, c’est-à-dire l’empereur pour les Visconti. On retrouve souvent dans les documents anciens deux ancêtres pour cette famille : Eriprando (Heriprand) Visconti et Valderico Visconti .

Bien que l’on sache qu’ils participèrent aux croisades aux côtés des Templiers et s’y illustrèrent par leur courage et leur foi en tant qu’armée du Christ,on retrouve peu d’écrits les mentionnent.

Templiers

 Il est donné d’un accord commun, que le premier Visconti dont on parla fut Eriprando Visconti fils de Boniface et Beatrice Visconti di Modrone qui vécut de 990 à 1037. C’est un petit seigneur de la région milanaise mais interférant déjà dans la direction de la ville de Milan. Il s’agissait probablement de l’une des familles de capitanei que l’archevêque Landolfe (979-998) avait investi de fiefs dits caput plebis. La documentation relative remonte à 1157 et il en ressort que les Visconti étaient titulaires du capitanat de Marliano (aujourd’hui Mariano Comense). Ils obtinrent avant 1070 l’office public de vicomte, qui devint rapidement héréditaire pour toute la descendance masculine. À la fonction de vicomtes ou vicaires du comte est liée l’adoption du blason représentant une vipère qui avale un enfant et que l’on retrouve aujourd’hui encore dans les armes de la Commune de Milan. La famille se divisa bientôt en plusieurs branches, dont certaines investies de fiefs éloignés de Milan. La branche dont viennent les seigneurs de Milan descend d’Umberto.

Bien que l’on trouve trace d’Eriprando Visconti, c’est Umberto , décédé en 1248, qui fût considéré comme le fondateur de la dynastie.

Ses descendants, de père en fils, accroissent leurs pouvoirs. Ils sont seigneurs de Massimo, Albizzate, Besnate et Cislago, petites localités de la région de Varèse au nord de Milan. C’est là leur assise nobiliaire de petits seigneurs provinciaux. Leur base plus déterminante se trouve à Milan où ils demeurent la plupart du temps à l’affut du pouvoir. Dans un Milan  mouvementé, ils surent toujours tirer avantage de la situation et gagner en influence comme en pouvoir jusqu’à devenir consul de la ville.

Personnellement, je compare cette manière d’agir à celle de Louis XI de France, dit le prudent ou l’araignée. A force de patience, d’intelligence et d’alliances stratégiques qui démontrent son génie politique, il donna à la France les frontières que nous lui connaissons actuellement, Alsace et Corse en moins.

Cependant, si le roi de France détestait la guerre, ce ne fut pas le cas des Visconti qui livrèrent une lutte sans merci contre la famille dominante de Milan: Les Della Torre une famille italienne d’origine espagnole à l’instar des Borja qui italianiseront leur nom en Borgia.

Les Della Torre

Les Della Torre ou Torriani  de Milan, ennemis malchanceux des Visconti.

Della Torre Armoiries

Au XVIe siècle, ils ont obtenu de Charles Quint le contrat pour les services postaux de l’Empire, acquérant ainsi une grande influence et une grande richesse. Leur monopole fut réaffirmé par le titre, hérité dans la famille, de surintendant général des postes du Saint Empire romain germanique en 1595 et de maître général des postes de l’Empire en 1615. Leur prestige est souligné par le titre de comtes (1624) puis de princes d’Empire (1695). Au cours du XIXe siècle, ils ont donné à l’Autriche et à la Bavière d’éminentes personnalités militaires.

Le conflit entre les deux grandes familles

La famille Visconti est passée de la petite noblesse au pouvoir réel lorsque le pape Urbain IV a nommé Ottone Visconti (1207-95) archevêque de Milan (1277) afin de soumettre l’influence de la famille Della Torre au pouvoir, qui était le leader établi d’un parti populaire. Ottone n’a pas déçu le pape en atteignant cet objectif, mais il est même allé au-delà  des attentes papales, en battant les Della Torre à la bataille de Desio en 1277 et en prenant le contrôle des pouvoirs temporels des archevêques de Milan. A cet instant seulement, le déclin de la famille Della Torre s’amorce.

A cette tension latente, s’ajoute un conflit entre Guelfes partisans de la famille germanique Welf et du Pape et les Gibelins, eux, partisans des Hohenstauffen et de l’empire germanique dont font partie les Visconti.

Pendant plusieurs dizaines d’années l’influence des Visconti monte sans que les Torriani s’effacent. La tension est permanente dans la direction de la république. Cela s’achèvera par un conflit armé entre les deux familles, une alternance de leur pouvoir, et finalement la disparition de la république, et la victoire des Visconti qui deviennent seuls maitres de Milan.

Dans la descendance de ces premiers Visconti on distingue :

Ottone (mort le 18 août 1295, à quatre-vingt- huit ans), chanoine de Desio et comme tel envoyé en France, où le connut et apprécia le cardinal Ubaldini, qui le protégea et le fit, malgré les Torriani, seigneurs de Milan, élire archevêque de ce siège en 1262. Il ne put en prendre possession que quinze ans après, le 24 janvier 1277, après maintes défaites et la victoire de Desio, qui le fit nommer seigneur de Milan. Dès lors, pendant dix-huit ans, tous ses efforts furent dirigés à laisser le pouvoir à son neveu Matteo. 

Matteo, né à Invorio le 15 août 1255, mort à Crescenzago le 24 juin 1322, ne trouva pas d’hostilité jusqu’en 1302; mais alors il dut s’enfuir à Nogarola (Vérone) où il vécut longtemps. Henri VIII l’en tira pour le réconcilier avec les Torriani. Par un soulèvement bien organisé, il sut chasser à jamais ses rivaux, se fit reconnaître vicaire impérial et chef des gibelins en Lombardie, étendit par ses conquêtes son pouvoir sur Plaisance, Tortone, Pavie et Bergame, Verceil, Crémone et Alexandrie. Excommunié par le légat Bertrand du Puy, il abdiqua en faveur de son fils Galeazzo. 

Marco (mort en 1329), un de ses autres fils, fut le célèbre capitaine de la compagnie des Allemands qui se rendit maîtresse de Lucques et de Pise

Galeazzo (1277-1328) se réfugia en France en 1302, passa ensuite à Ferrare et rentra à Milan avec son père. En 1313, il devint seigneur de Plaisance; en 1321, il vainquit les Cavalcabo de Crémone à Bardi. Successeur de son père, il fut chassé de Milan et presque aussitôt rappelé. Le soulèvement des guelfes lui fit perdre tout l’État; en 1323, assiégé dans Milan, il appela Ludovic de Bavière qui le sauva. L’année suivante; la victoire de Vaprio lui rendit la tranquillité, mais accusé auprès de l’empereur pour s’être pacifié avec l’Église, il fut arrêté et emprisonné à Monza et délivré seulement par l’intercession de Castruccio Castracani. 

Metropolitan Museum of Art: European Sculpture and Decorative Arts

La lignée continuera à se battre pour agrandir ses possessions et faire monter leur influence sur la Lombardie imprimant définitivement son empreinte sur la ville de Milan.

Cette lignée  légitime, descendante de Umberto Visconti, s’éteindra  faute d’héritiers mâles après le décès de Filippo Maria, mais elle perdurera  via d’autres ramifications. En France avec les Valois par l’intermédiaire de Valentina Visconti, et plus tard les Bourdons. En Angleterre par les descendants de Lionel of Clarence , fils du roi Edouard III qui épousa Violante di Visconti.  En Italie via les Sforza qui s’éteignent également faute d’héritiers mâles. Cependant, aujourd’hui on les retrouve par le biais des Brivio-Sforza

D’autre part, les deux branches cadettes issues de Gaspare, frère de l’archevêque Ottone   et d’Uberto Pico, frère de Matteo seigneur de Milan. Puis, nous avons la branche bâtarde issue du duc Barnabo Visconti et son fils naturel Sagramoro. En ces temps, les enfants bâtards ne pouvaient pas bénéficier des mêmes droits et prétentions que les enfants légitimes.

On pourrait encore ajouter les Alcardi-Visconti, famille dont l’ancêtre Alcardi, s’est vu attribuer par un duc Visconti, le droit de joindre le nom Visconti au sien, en récompense de services rendus. En dénonçant un complot, il sauva la vie du Duc Filippo Maria Visconti

Enfin, il faut signaler un cousin Visconti, devenu pape entre 1271 et 1276 sous le nom de Grégoire X. On ne lui connaît aucune intervention dans l’intérêt de sa famille : Au contraire, il s’opposa aux visées de son cousin l’archevêque Ottone.

LES SEIGNEURS ET DUCS DE MILAN

Ottone fatigué, démissionne en 1191. Son frère Obizzo et son neveu Teobaldo sont morts avant lui. Il transmet donc le pouvoir à son petit neveu, Matteo qui sera surnommé le grand.

Matteo règne jusqu’en 1302, date à laquelle il est renversé au profit d’un Torriani, mais il reprend le pouvoir en 1217 et le gardera jusqu’à sa mort en 1222. Les Torriani sont définitivement éliminés, ils ne réapparaitront plus sur la scène politique milanaise.

La postérité de Matteo va régner sur Milan pendant près d’un siècle et demi, dix souverains Visconti se succéderont.

Ce ne sera pas sans conflit divers, y compris au sein de la famille : A deux reprises, trois frères Visconti se soulèvent contre leurs oncles au pouvoir. Ils sont battus, exilés, puis pardonnés, et finiront par régner à leur tour en se partageant les terres du duché dans une « saine rivalité » entre eux. C’est une époque troublée en Italie, rien n’est acquis, le plus fort ou le plus adroit s’impose, même en famille. Si ce n’est pas le cas, on partage, provisoirement.

A la génération suivante Gian Galeazzo, seul seigneur de Milan, réunit toutes les possessions. Il est vu comme un unificateur.  Conquérant, il élargit par la guerre les terres de Milan dont la puissance est à son apogée, jusqu’à inquiéter celle de Florence. Il  est également visionnaire, inscrivant la grandeur de sa famille dans la pierre. Il lance la construction du « duomo » de Milan, 

et achève celle du chateau de Pavie, réputé comme la plus belle résidence princière d’Europe à cette époque. Moyennant le versement de 100 000 florins, il obtient de l’empereur germanique le titre de « duc » de Milan en 1395, le milanais étant un fief de l’empire germanique.

Le Chateau Visconti à Pavie

Gian Galeazzo meurt en 1402. Il a épousé en deuxièmes noces sa cousine germaine Caterina Visconti qui lui donne deux fils. Le second, Filipo Maria, malgré ses tares physiques, ne fut pas finalement un mauvais souverain pour Milan. Il fut habile, et sut s’entourer des meilleurs condottieri de l’époque. Ces condottieri étaient des chefs militaires disposant  d’une troupe armée soit guerroyant pour son compte et se payant par rapines et pillages, soit en se mettant au service des princes, selon le principe du plus offrant financièrement.

Le mariage du condottiere Francesco Sforza avec Bianca la fille unique de Filipo Maria témoigne de la montée en puissance de ces militaires sauvages. Déjà Barnabo, seigneur de Milan,  grand oncle de Filipo Maria, avait marié plusieurs de ses filles à ses différents condottieri.

Filipo Maria meurt en 1447. Il n’a pas d’enfant « légitime », Bianca est une bâtarde et en principe, une bâtarde ne saurait hériter.

Filipo Maria a une demi-sœur, Valentina, fille de Gian Galeazzo et d’Isabelle de France, sa première épouse. Elle a épousé Louis de France, duc d’Orléans, frère du roi de France, Charles VI le fol. En 1447, bien après sa mort, son fils le poète Charles d’Orléans a hérité de ses droits.

A cette date, Charles d’Orléans est sorti de ses 25 années de captivité en Angleterre : Il se consacre essentiellement à la littérature en son château de Blois, et bien que ne renonçant pas à ses droits sur le milanais, il n’entreprendra rien militairement pour conquérir son duché italien.

Son fils, Louis, duc d’Orléans, futur roi Louis XII, participera activement aux campagnes militaires pour récupérer le duché soutenu en cela par le roi de France.

Avant cela, à Milan, en 1447, c’est la révolution. Un groupe de citoyen se soulève et la république est proclamée. Elle durera trois ans sous le nom de « république ambrosienne » car elle se référait à San Ambrosio, très ancien évêque de Milan.

Les espagnols de Naples, le duc de Savoie, l’empereur germanique, manifestent leur intérêt pour la prise de Milan. Mais c’est finalement le condottiere Francesco Sforza qui viendra à bout militairement de la  république et de tous les prétendants. En 1450, il fait son entrée dans Milan, devient duc, et s’inscrit comme successeur et prolongateur des Visconti.

Ses descendants vont régner sur Milan jusqu’en 1535 Moyennant des interruptions, avec cinq ducs sur deux générations.

Mais si les Visconti ont du affronter des rivalités milanaises internes, ou extérieures italiennes, les Sforza vont se trouver eux confrontés à des puissances autrement considérables : La France des Valois et l’empire européen des Habsbourg en concurrence pour s’approprier l’Italie et spécifiquement le Milanais.

En France, les rois de France ne se sont guère souciés de leurs droits italiens tant que la guerre de cent ans les opposait aux anglais et aux bourguignons. A la fin de cette guerre, Charles VII et son fils Louis XI vont avoir comme principal souci, une fois l’anglais chassé, de régler la question bourguignonne et d’établir leur autorité sur l’ensemble du royaume de France.

Toutefois, en 1480 meurt le roi René, éphémère roi de Naples. Il lègue à Louis  XI, son cousin, L’Anjou et la Provence et aussi ses droits sur le royaume de Naples, alors occupé par les espagnols.

Louis XI transmet ces droits à son fils Charles VIII qui en 1494 entreprend la première guerre d’Italie qui durera trois ans. Son cousin Louis d’Orléans, héritier de Milan, se joint à l’expédition avec l’ambition de récupérer son duché italien.

L’expédition est d’abord victorieuse sur plusieurs fronts et Charles VIII atteint Naples pendant que Louis d’Orléans affronte les troupes des Sforza. Mais la contre-offensive des hispano-napolitains met l’armée de Charles VIII en déroute qui se replie en France en 1497. Louis d’Orléans doit évacuer les territoires qu’il a conquis, incapable  de résister aux Sforza renforcés par les espagnols.

Charles VIII meurt en 1498. Louis d’Orléans lui succède sous le nom de Louis XII. Il réunit donc sur sa personne les prétentions françaises sur le royaume de Naples et sur le duché de Milan.

Ce sont là des ambitions territoriales, visant la richesse et le pouvoir. C’est aussi un enjeu géopolitique crucial : Les Habsbourg, par leurs alliances matrimoniales, sont en train de constituer un empire qui encercle la France : Ils ont l’Espagne et son empire américain, les Flandres et territoires adjacents, la comté de Bourgogne, l’empire germanique, l’Autriche, le royaume de Naples. La possession du Milanais finirait d’achever cet encerclement.

En revanche, si la France parvient à s’emparer d’une grande partie de l’Italie avec Naples et Milan, elle rééquilibrerait un peu le rapport de force.

Il faut ajouter une dimension culturelle à ces guerres italiennes : Aussi divisée soit elle, l’Italie est alors le centre de la révolution culturelle connue sous le nom de renaissance. L’Italie fascine les Français comme les autres peuples, elle rayonne, et chacun veut à la fois s’y rendre pour l’admirer comme se l’accaparer.

Louis XII va mener la deuxième guerre d’Italie à Partir de 1499. Cette fois aussi, c’est d’abord un succès complet. L’essentiel de la péninsule passe sous domination française. Les Sforza sont chassés de Milan. Mais en 1506, Ferdinand d’Aragon reprend le royaume de Naples. Les Français se replient sur le nord. En 1513, après la défaite de Novare, les forces françaises abandonnent l’Italie.  Louis XII meurt en 1515.

Son cousin et beau-fils François Ier lui succède. La même année, il entreprend la troisième guerre d’Italie. C’est un succès total par la fameuse bataille de Marignan. La guerre se limitera cette fois au milanais et à la Lombardie sur lesquels le roi de France règnera jusqu’en 1522.

Une paix est signé avec Charles Quint par laquelle ce dernier reconnaît la souveraineté de François Ier sur Milan. Celui ci en revanche renonce à ses prétentions sur Naples. Mais les hostilités reprendront vite, François Ier tentant de s’emparer de Naples malgré son engagement. Il sera défait et en 1522 les Visconti-Sforza reviennent à Milan.

Pendant deux ans, la guerre se poursuit en Lombardie jusqu’à la victoire en 1524 des espagnols commandés par le connétable de Bourbon. C’est la défaite de Pavie pour les troupes françaises qui abandonnent leurs derniers territoires en Italie.

Le dernier duc Visconti-Sforza, Francesco II Maria meurt sans héritier en 1535. Les Troupes espagnoles prennent possession du Milanais.

Milan restera sous domination espagnole jusqu’en 1713. Par le traité d’Utrecht, le duché passe sous la coupe autrichienne et le restera jusqu’en 1861, à l’exception de la période d’occupation de la révolution française et de la période napoléonienne. L’Empereur, comme dans nombre de villes européennes n’est pas des plus populaires à Milan.

En 1861, Milan est intégré au nouveau royaume D’Italie.

Cependant, la lignée légitime perdurera, notamment grâce aux femmes.

LES PETITS VISCONTI

Il s’agit à la fois des branches cadettes de la famille et de la descendance « bâtarde » du duc Barnabo. Si aujourd’hui cela peut nous paraitre totalement désuet, sachez qu’avoir une preuve de légitimité de sang était la condition sine qua none. Il en allait de rang, statut social, conditions de vie et prétentions sur des terres. Les enfants « bâtards » n’étaient pas reconnus, bien que nombre de roi, je pense particulièrement à Henri IV de France et plus tard son petit-fils Louis XIV qui légitimèrent leurs enfants bâtards. Par ailleurs, cette notion a été tellement ancrée dans la construction de la structure sociale, qu’en France, ce n’est qu’en 2001 que le terme  » enfant adultérin ou enfant illégitime’ disparait. Désormais dans l’hexagone tous les enfants peuvent hériter de manière homogène.

Mais revenons à nos Viscontis. Pendant bien des années, voire même des siècles, ils vont de se multiplier et avec le temps, réclamer les mêmes droits que les Viscontis légitimes.

Répartis en plusieurs branches, elles-mêmes comptant plusieurs ramifications, ils occupent les fonctions de  » condottiere, prêtre, seigneurs etc.. dans les petites localités d’Italie: Brignano, Saliceto, Paggazano, Galamero, Borgoratto, Montenero, Vimodrone, Grazzano, Cislago, Somma, San Vito, de la Motta San Vito, Breme, Carbonero, Carono, Groppello, Albizzate, Brebbia, Caravaggio, Fontaneto, Lonate Pozzolo, Corgena, San Alessandro, Agnadello, Castelloto, Marignano, Borgonovo, de San Giovanni etc, etc…

Obtenir de nouveaux titres se révèle être une véritable challenge aussi, regroupent-ils les noms ou alors ils se partagent un fief qu’ils gèrent à plusieurs entre frères, cousins etc.. Vivre et tenir son rang est difficile en fonction du rang et des fonctions occupées, ce qui leur rapporte des rentrées pécuniaires assez fluctuantes. Et obtenir des charges à Milan qui conserve en dépit des ans et des familles la marque des Viscontis légitimes relève de la prouesse.

A ces  » petits Viscontis » il faut rajouter les personnes n’ayant aucun lien de sang ou de parenté avec eux, mais dont les actes de dévouement, service et/ou de bravoure leur valurent le droit d’être appelés Visconti, bien qu’ils n’aient absolument rien à voir avec l’une des deux branches, légitime ou adultérine. 

Ayant des titres de petite noblesse ( baron, comte) ils contractèrent des unions dont certaines furent consanguines. Je vous laisse imaginer les dégâts au niveau de la génétique. Parmi les cas le plus abherents on retrouve deux sœurs Margherita et Paola. La première épousa son oncle et la seconde épousa son neveu fils de son oncle et de sa soeur!  Bien sur, de nos jours cela nous semble totalement fou, mais ce cas n’est pas unique dans l’histoire de l’humanité

Le seul moyen de s’élever dans la hiérarchie sociale: côtoyer et s’allier autant que faire se peut à leurs cousins régnants, afin de grappiller quelques miettes de pouvoir, ou en participant à des complots pour les trucider. Tu quoque cugino ? voici ce que le Duc Gian Maria Visconti, à l’instar d’un César trahi par Brutus, aurait pu déclarer quand son cousin Ottone participa au complot qui le tua.

Cependant, bon sang ne saurait mentir, ces petits Viscontis, comme leurs cousins légitimes, seront des amateurs d’art, mécène et protecteurs.

Les Viscontis aujourd’hui

Au fil des ans, des alliances, des guerres et assassinats, certaines ramifications de la famille s’éteignent. Certaines dont la légitime, perdurent et l’ont retrouvent les branches les plus célèbres et qui re feront la renommée de la famille au cours du 20ème siècle. La branche des Ducs  Visconti di Modrone  la descendante directe d’Umberto Visconti, et qui se verront offrir le Ducat de Grazzano-Visconti en1937 par le roi d’Italie Victor-Emmanuel III.  Une autre   branche existait, celle des Marquis et non Duc Visconti di San Vito à qui l’on doit le magnifique chateau qui se voit dans la vidéo ci-dessous.  En1950 il est propriété du Marquis Don Alberto Visconti di San Vito, puis de son fils Gabrio. Mais le Marquis décède en 1997

Les Viscontis di Modrone

Descendant de Uberto Pico, frère du seigneur de Milan, Matteo le grand, cette branche a longtemps été titrée Comtes de Lonate-Pozzolo.  Apparentée aux Visconti de Milan, elle a été fondée en 1683 par Niccolo Visconti  di Somma  qui épousa Teresa Modroni

Francesco Antoni Visconti di Modrone , petit-fils de Nicclo sera titré Marquis de Vimodrone en 1778 Le titre de Duc pour lequel ces Viscontis sont le plus connus, leur sera accordé en 1813 par l’empereur Napoléon 1er à Carlo Visconti di Modrone (1770-1836). La famille va s’illustrer dans la lutte pour l’unification du Royaume d’Italie et sera également un mécène très actif. 

Ainsi le duc Guido, mort en 1902, sera sénateur du royaume, et président du Théatre de la Scala de Milan. Il en sera de même pour son fils ainé Uberto, sénateur et protecteur des arts. Marcello, son fils, mort en 1964, créera et présidera le conservatoire Giuseppe Verde.

Une branche cadette des Visconti di Modrone est apparue avec Giuseppe, frère cadet d’Uberto. Cette branche devrait récupérer le titre de duc Visconti di Modrone à la mort de Gian-Galeazzo.

Giuseppe, mort en 1941, fut le protecteur du théâtre Manzoni de Milan. Mais il est surtout connu pour son remarquable travail de réhabilitation du village de Grazzano, à la fois dans les pierres, (maisons, monuments, et demeure des Visconti) qu’en y installant des activités diverses, essentiellement artistiques et artisanales.

Depuis le début du 19eme siècle, la famille Visconti di Modrone est à la tête de divsrses entreprises, reprises ou créées en leur nom propre; filatures, créant de nouvelles fibres et de nouveaux tissus. Gian Galeazzo est à la tête de cette entreprise qui a été beaucoup diversifiée : bijoux vêtements, mode, parfum… en collaboration avec sa femme Osanna. Le couple a 3 enfants.

Gian Galeazzo et Ossana Visconti di Modrone

Luchino Visconti, le cinéaste, était l’oncle de Gian Galeazzo, et donc frère cadet de son père. Il portait le titre de comte de Lonate-Pozzolo, titre réservé au cadet, l’ainé étant duc de Visconti-Grazzano.

A sa mort en 1976, son titre a été transmis au fils du troisième frère, son neveu Eriprando. Eriprando était comme son oncle un cinéaste. Son travail fut bon et original, mais sans toutefois posséder la qualité, le génie et l’émotion que l’on retrouvent dans les oeuvres de Luchino Visconti Il est décédé en 1995.

Un autre de ses neveux, fils de la soeur Ida Visconti di Modrone, décéde en 2021 des suites du covid; Giovanni Gastel était un photographe de mode depuis les années 70 ayant travaillé pour Vogue Italia notamment. Fortement influencé par les oeuvres de Irving Penn, il est l’auteur de plusieurs livres et a photographié plusieurs personnalités dont l’ex président des Etats Unis Barack Obama

Membres notables de la famille

Uberto Visconti di Modrone (1871-1923), entrepreneur.
Marcello Visconti di Modrone (1898-1964), fils d’Uberto.
Guido Visconti di Modrone (militaire) [it] (1901-1942)
Luchino Visconti di Modrone (1906-1976), metteur en scène de théâtre, d’opéra et de cinéma.
Eriprando Visconti di Modrone (1932-1995), réalisateur.

Gian Galeazzo Visconti di Modrone ( 1962) acteur 
Violante Visconti di Modrone, décoratrice sur le film Call Me by Your Name (2017), nominée aux Oscars

 
Sources

Leprohon, Pierre. The Italian Cinema. Roger Greaves and Oliver Stallybrass, trans. New York: Praeger, 1972.

Nowell-Smith, Geoffrey. Visconti. Garden City, N.Y.: Doubleday, 1968.

Servadio, Gaia. Luchino Visconti: A Biography. New York: F. Watts, 1983.

Stirling, Monica. A Screen of Time: A Study of Luchino Visconti. New York: Harcourt Brace Jovanovich, 1979.

http://www.luchinovisconti.net/visconti_pg/biography.htm

http://www.imdb.com/name/nm0899581/

http://en.wikipedia.org/wiki/Luchino_Visconti

http://gayfortoday.blogspot.com/2007/11/luchino-visconti.html

https://www.bfi.org.uk/news-opinion/news-bfi/features/fast-track-fandom-where-begin-luchino-visconti

A lire dans la série

Le Milan des Viscontis-partie 2

Copyright © 2017 Angie Paris Rues Méconnues Officiel  1998- 2017. Tous droits réservés

Written by Angie

    Un commentaire

Leave a Comment